Le projet K’HUTTE est le premier projet logement porté par Familles Solidaires en coopération avec l’AFTC Alsace. Depuis septembre 2015, l’AFTC Alsace a les clés des deux appartements qui sont destinés à des personnes ayant une cérébrolésion. L’association a fini d’aménager les lieux communs et a préparé l’entrée des colocataires avec leurs familles.
En décembre, Kelly, Karine, Cédric et Alain ont emménagé dans la colocation du rez-de-chaussée, et Nicolas, un jeune homme travaillant en ESAT * la journée, a installé ses meubles dans le deux pièces du 1er étage. Nous les avons rencontrés un mois plus tard pour recueillir leurs premières impressions. *Établissement Spécialisé d’Aide par le Travail
Une journée à K’HUTTE
Le matin, les locataires se lèvent selon leur planning personnel. Une auxiliaire de vie présente dès 6h du matin pour guider, stimuler et soutenir la vie quotidienne. La plupart du temps les rendez-vous médicaux (à domicile ou à proximité du logement) ont lieu en matinée, après le petit-déjeuner et la toilette de chacun. L’accompagnement médico-social des locataires est coordonné par le SAMSAH* de l’AFTC, s’assurant que le projet de vie formalisé est le fil conducteur des actions menées.
*Service d’Accompagnement Médico-social pour Adultes Handicapés
« Ici, je deviens adulte » confie Kelly
En fin de matinée, les locataires préparent ensemble le repas, soutenu par un‑e auxiliaire de vie de Présence 67 (le prestataire d’aide humaine). Aujourd’hui, c’est paëlla, avec la touche personnelle de chacun dans la recette. Le repas est collectif, c’est un moment convivial pour échanger les uns avec les autres.
L’après-midi, des activités peuvent être organisées selon les envies de chacun : une sortie, des jeux par exemple, quelques courses dans le quartier… Et une fois à deux fois par semaine, les colocataires vont à l’accueil de jour de l’AFTC pour des activités de stimulations cognitives et de sport adapté.
Cet après-midi, Kelly est partie pour une activité en accueil de jour. A domicile, un jeu de société est lancé par les colocataires et l’AVS.
Lors du jeu, Karine émet le souhait de pouvoir sortir un petit peu dans le quartier, elle a quelques achats à faire. Ni une ni deux, le collectif se met d’accord : et c’est parti pour une sortie improvisée dans le quartier ! L’avantage du petit collectif réside dans cette possibilité de pouvoir construire jour après jour, et avec les colocataires, ces petites choses qui font le quotidien.
Ce moment est aussi l’occasion de rappeler les réflexes à adopter avant chaque sortie : prendre son téléphone portable, sa carte blessée,… L’AVS nous confie que ce travail au quotidien permet d’améliorer l’autonomie, pour qu’un jour ils puissent le réaliser peut-être seuls.
Cédric avec humour : « Dans ce logement, je peux vivre ma vie, sans être dans les jupes de ma mère. »
Enfin, le soir arrive, les colocataires rentrent de leurs activités. Certains participent à la préparation du repas, d’autres ont besoin de se reposer un peu. Chacun s’organise, toujours avec la bienveillance de l’auxiliaire de vie présente. Nicolas, quant à lui rentre de l’ESAT, il passe déposer ses affaires dans son deux pièces, et récupère les yaourts qu’il apporte pour les colocataires du rez-de-chaussée. Il descend rejoindre les colocataires pour partager le repas avec les colocataires, il a trouvé sa place dans le collectif.
A 23h, l’auxiliaire de vie s’assure que chacun est prêt à se coucher puis s’en va. Pendant quelques semaines une veille couchée a été organisée pour observer les comportements la nuit (pertes de repère, réveil en pleine nuit, angoisses…). Désormais, chacun a un médaillon de télé-alarme pour une alerte d’urgence si besoin. De plus, des chemins lumineux dans l’appartement rendent la nuit sécurisante.
De belles perspectives…
Les locataires sont toujours volontaires pour faire des activités intérieures ou extérieures, et au bout de quelques semaines, les équipes du SAMSAH constatent déjà les premières évolutions dans la prise de repères, la diminution des troubles du comportement associés à leur cérébrolésion spécifique. Ce qui est tout à fait surprenant, c’est la solidarité des locataires entre eux et le soutien réciproque dans les complémentarités qu’ils s’apportent. L’un est désorienté, l’autre connaît des déséquilibres dans la marche. C’est bras dessus bras dessous, que Karine et Alain se soutiennent dans la marche.
Le + de l’autopromotion au quotidien
Un lien fort s’est créé entre les K’Huttiens (petit nom des habitants de K’HUTTE), depuis le début de ce projet en autopromotion. Une photo posée dans le salon de Nicolas nous le confirme : « c’était le pot d’intégration avec les voisins » nous dit-il. Le SAMSAH nous confie que les relations avec les voisins sont tellement aidantes pour le projet et les locataires, qu’ils envisagent des actions spécifiques dans les semaines qui viennent. Les locataires cérébrolésés proposeraient des desserts et potages à tout le collectif afin de faciliter la vie quotidienne des autres locataires !
Mais chut… Cela sera annoncé lors du prochain « stammtisch » qui réunit les habitants tous les quinze jours, dans la grande salle sur la magnifique terrasse !
(En Alsace, un stammtisch est une tablée traditionnelle qui permet de se retrouver autour d’un repas ou d’un verra pour discuter et s’amuser)
Dans cet écosystème, le logement constitue un prolongement de l’accompagnement global des locataires : activités, vie quotidienne, santé, lien social… Les locataires évoluent dans un environnement sécurisé et adapté. Une famille présente ce jour-là pour notre visite nous confiait leur soulagement d’avoir trouvé une solution durable pour leur fils. Ils savent qu’ils ne pourront pas toujours être présents pour lui…